« Long live the TV ! » A propos des séries historiques britanniques, 1ère partie

Introduction

Grande fan de séries et adoratrice du pays du tea, de sa Majesté la Reine Élisabeth II et des meilleures comédies romantiques (of course, l’Angleterre), j’ai la chance, depuis plusieurs années, de pouvoir allier ces deux plaisirs grâce à l’émergence de dizaines de séries sur l’histoire d’Angleterre (ou de la Grande-Bretagne plus généralement, mais ne chipotons pas sur les détails).

Depuis 2005 environ, chaque rentrée apporte son lot de séries relatant un pan de l’histoire britannique, produites aux États-Unis ou en Grande-Bretagne d’ailleurs. Tout cela a néanmoins commencé bien plus tôt, avec la BBC, par exemple, et son Orgueil et Préjugés (Pride and Prejudice, 1995), mini-série de Simon Langton et Andrew Davies adaptée du roman de Jane Austen, qui a connu un grand succès chez les sujets de sa Majesté.

Pour ses nombreuses séries, le but des scénaristes n’est en général pas de coller au plus près de l’Histoire, mais de proposer une vision, un point de vue, ou d’effleurer les faits historiques, en choisissant comme héros/héroïne des personnages dont les vies, hautes en couleur, se prêtent parfaitement au format sériel.

Leur intérêt et leur point commun, c’est surtout de mettre en valeur le patrimoine anglais : histoire du pays et grands personnages, dynasties royales, paysages, art, architecture… Issues de la tradition très anglaise des period drama – on peut trouver aussi costume drama ou heritage (films)[1] – elles sont très prisées des spectateurs anglais, mais plus seulement.

Si les chaines de télévision françaises ne se jettent généralement pas dessus, certaines séries ont tout de même la chance d’être diffusées en France (Downton Abbey sur la TNT par exemple) et, grâce à Netflix et autres chaines à abonnement (non je ne fais pas de pub), les autres trouvent quand même leur public français. Malgré tout, plusieurs n’ont toujours pas été diffusées en France (sur des chaines gratuites j’entends) : The Hollow Crown[2] avec notamment Jeremy Irons et Tom Hiddleston, The White Queen et sa suite The White Princess[3], etc.

Pour vous les faire découvrir ou redécouvrir, je vous propose un panorama de ces séries. Je parlerai surtout de celles que j’ai vues (logique), mais j’ouvrirai aussi mes perspectives (et les vôtres, je l’espère) sur des séries qui ne traitent pas nécessairement directement de l’histoire de l’Angleterre, mais qui l’évoquent en toile de fond, au gré des épisodes, des Tudors à The Crown, en passant par Victoria, Downton Abbey, Call the Midwife (Sos sages-femmes) ou encore Reign

Je ne dresserai pas de classement de valeur, car ces séries sont très différentes, ne serait-ce qu’en termes de genre. De plus, mêmes si certaines se permettent de grands raccourcis par rapport aux faits historiques, cela n’enlève rien au plaisir (coupable ?) de les suivre, si ?

Les Tudors :

Comme il faut bien commencer quelque part, je débuterai cette série d’articles par Les Tudors (The Tudors), série créée par Michael Hirst (à qui l’on doit aussi Vikings) diffusée entre 2007 et 2010. Coproduite par les États-Unis, le Canada et l’Irlande (pas très anglais tout ça !), elle a eu quatre saisons de dix épisodes (sauf la saison 3 qui ne compte que 8 épisodes). C’est à peu près à partir des Tudors qu’a commencé cette vague de série historique, avec une production plus ou moins fournie selon les années.

Les Tudors, comme son nom l’indique (mal, d’ailleurs), évoque le règne tumultueux du roi d’Angleterre Henri VIII (1509-1547), mais omet le reste de la dynastie de la Maison Tudor (House Tudor) qui s’étend en fait de 1485 à 1603. Bon, il faut bien le dire, ce n’est pas le seul raccourci que les scénaristes ont pris !

En effet, nombreux sont les anachronismes, les personnages supprimés ou condensés[4], dont le physique ne correspond en aucun cas aux tableaux et descriptions de l’époque, et autres petites erreurs (volontaires ou non). L’intérêt de la série ne réside pas dans ces détails, mais bien dans les intrigues politiques, les histoires sulfureuses, la beauté des costumes (ça ne vous rappelle pas Game of Thrones par hasard ? – avec moins de budget, clairement).

Henri VIII a la réputation d’aimer les femmes (il en a épousé six, en a fait décapiter deux et en a renvoyé une chez elle après six mois de mariage – bah sa tête ne lui revenait pas) et ses histoires d’amour successives ont tout bonnement conduit à la mise en place d’une nouvelle religion (ouais il était comme ça Henri, par amour il aurait fait n’importe quoi !).

Ce que la série montre plutôt habilement, c’est que la soif de pouvoir de ce roi fou, le conduit à mener son pays au bord de la guerre civile à cause des questions de religion : persécution des catholiques sous son règne, puis des protestants sous le règne de sa fille Marie Tudor (connue comme « bloody Mary »), puis re-persécution, même modérée, des catholiques sous le règne d’Elisabeth, sa fille cadette. (Une famille sympa en fait…) Cependant, le règne élisabéthain (1558-1603) est tout de même considéré comme un véritable âge d’or pour l’Angleterre, notamment en ce qui concerne la culture et l’art, mais aussi en termes de tolérance religieuse (comme quoi, avec une famille comme ça…).

Entouré de manipulateurs ou d’hommes aussi fous que lui, et de trop peu de véritables amis, Henri VIII ne fait rien dans la demi-mesure : il rejette sa première épouse et sa fille Mary, fait de même avec sa seconde fille, Elisabeth, mais les rétablit toutes les deux dans l’ordre de succession ! Difficile à suivre… C’est évidemment en cela que ce personnage est si intéressant à l’écran, bien que la série parvienne à ne pas prendre son parti et laisse au spectateur le loisir de juger de ses actes.

C’est l’acteur/mannequin irlandais Jonathan Rhys Meyers qui incarne Henri, de façon plutôt convaincante, je dois bien l’avouer, même si son physique n’est pas exactement celui du roi (je vous laisse en juger). Il est accompagné par un traditionnel casting de beaux et belles gosses : Nathalie Dormer (tiens, tiens, Margery avait déjà été reine avant Game of Thrones), Henry Cavill (Superman himself), mais aussi d’acteurs de cinéma comme Sam Neill (Alan Grant de Jurassic Park !) ou James Frain.

La présence de ces acteurs fait figure d’exception et permet selon moi à la série de ne pas sombrer dans le défilé de mode (ce qui malheureusement est bien trop fréquent). Pour rappel, en 2005, jouer dans une série n’est pas spécialement glorieux pour un acteur de cinéma.

Aujourd’hui, le rapport de force est inversé, puisque les stars de cinéma ne demandent qu’à passer du grand au petit écran, avec des prix prestigieux à la clé (Nicole Kidman et son Golden Globes tout frais pour la mini-série Big Little Lies ou Ewan McGregor pour Fargo par exemple). En bref, aujourd’hui c’est très tendance de jouer dans une série, mais à une époque c’était réservé à ceux qui n’arrivaient pas (encore) jusqu’au grand écran…

Mon bilan :

Un classique du genre. On en apprend tout de même un peu sur l’histoire de l’Angleterre. Attention, rien ne vaut une vraie leçon d’Histoire, ne révisez pas votre bac qu’avec Les Tudors ! C’est la série parfaite pour tous ceux qui aiment les bons acteurs, les intrigues politico-religieuses sur un fond d’histoires d’amour enflammées, le tout dans des costumes et décors qui n’ont pas à rougir d’un budget qui n’est certainement pas celui des séries d’aujourd’hui. Si vous n’aimez pas du tout cette série, peut-être que les séries historiques ne sont pas pour vous.

Notes :

[1] Voici la définition que j’en donne dans mon mémoire universitaire (Joe Wright et l’adaptation : jouer avec les attentes du spectateur, 2014) en me basant sur la thèse de Lydia Martin : Il s’agit de films (ou séries) historiques, en costumes, qui mettent l’accent sur le patrimoine anglais ou l’histoire du pays. Le « period drama » s’appuie plutôt sur des faits historiques, à une période donnée et dans une sphère plus ouverte sur le monde. Le « period drama » et le « costume drama » sont des types de « heritage film » (ou série), l’un concentrant son attention sur un évènement historique, l’autre sur la qualité des costumes et décors. MARTIN Lydia, Les Adaptations à l’écran des romans de Jane Austen, Esthétique et idéologie, L’Harmattan, Paris, 2007, pp. 119-123.

[2] Série de plusieurs téléfilms produits par Sam Mendes (2012-2016, BBC Two) adaptés des œuvres de Shakespeare (Richard II, Henri IV, Henri V, Henri VI et Richard III). Diffusés uniquement sur la chaîne Histoire en France.

[3] Mini-série britannique basée sur les romans de Philippa Gregory (2013) et mini-série américano-britannique (2017), diffusées en France sur OCS Max.

[4] Dans la série, la sœur d’Henri, Margaret, est en fait un mélange entre Marguerite Tudor et Marie d’Angleterre, toutes deux sœurs du roi, mais reprend certains épisodes de la vie d’autres contemporaines. Plus qu’un raccourci, c’est un véritable imbroglio !

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