Doc en ligne – L’île aux Fleurs de Jorge Furtado

Toujours de la grande came mais aussi de grands classiques sur votre lettre favorite. Le film est suivi d’une
étude que j’avais fait en deuxième année à la fac. Veuillez excuser les fautes d’orthographes et autres erreurs de syntaxe et de goûts présents dans ce « travail », j’ai vraiment eu la flemme de
corriger tout ça à 100%. Reste à fêter le plus long article écrit de ma personne depuis la création de ce blog. Bientôt, mes dissert’ de philo de terminale en ligne 😀

En attendant, bon visionnage.

L’histoire : Une tomate est plantée, récoltée, vendue avant de
finir à la décharge de « L’île aux fleurs » parmi les porcs, les femmes et les enfants. Quelle différence y a-t-il entre les tomates, les porcs et les êtres humains ?


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Tout d’abord, il est difficile de résumer ce film de Jorge Furtado tant il semble partir dans tous les
sens. A vouloir le résumer, on aurait l’impression d’oublier forcément un élément intéressant de ce documentaire atypique. Les questions qu’il pose sont de savoir s’il s’agit vraiment d’un
documentaire. Dés le début est écrit : ce film est un film de fiction. Pourtant, peu à peu à la vision on a du mal à croire qu’il s’agisse uniquement de cela.
L’île aux fleurs interroge sur les signes perçus par le spectateur pour différencier le cinéma de fiction et le cinéma documentaire. Il est donc intéressant de prendre le
film de Jorge Furtado comme exemple puisqu’il démontre combien il est aisé de s’amuser avec la  » ligne  » qui les sépare. En effet, on ne sait pas trop dans quel domaine le placer surtout lors
des premières minutes.

ACTEURS ET SUPPORTS D’IMAGE
Tout d’abord, les personnes ou personnages qui apparaissent à l’écran appartiennent au deux genres. Passant de scène jouées à des prises de vues réelles, le spectateur oscille constamment entre
la réalité des images et les moments sur-joués par des acteurs. Mais les personnages vrais, ceux dont
Jorge Furtado montre la vie se plient aussi à quelques scènes les
sortant du contexte documentaire comme celle où M. Suzuki le japonais se soumet à une fausse séance photo pour expliquer ce qu’est un japonais selon le point de vue quelque peu humoristique du
narrateur.
Tout comme le devoir scolaire trouvé dans la décharge pose la question du documentaire.
Jorge Furtado a t-il réellement trouvé ce papier puisque cela donne lieu à une reconstitution (?)
de l’enfant passant un contrôle d’histoire.
Les moments « joués », notamment ceux de la famille de Madame Annette, rappellent des spots de publicités à la fois par leur image lisse et par les acteurs
si peu naturels. Cela amène le thème de la pluralité des supports utilisés pour ce film.
En effet, les supports d’image sont tout aussi variés : le premier plan de l’ile aux fleurs est celui de la Terre tournant dans l’espace mais il ne s’agit pas ici d’une image satellite mais
d’une maquette. Après l’apparition de M.Suzuki dans son champ de tomate, débute l’explication de ce qu’est un Japonais et c’est une suite d’éléments
disparates qui vont se charger de mettre en scène la définition : photo de l’intéréssé, photo de ses papiers, nom sur un écran d’ordinateur…

Vient ensuite la question de savoir ce qu’est un être humain : carton, dessin, main tenant un cerveau en plastique, effet d’animation, poule
sur fond noire et trois petits points… Bref, tous ces éléments constituent le mélange fiction/documentaire.
Furtado s’amuse aussi avec de nombreux collage notamment sur des œuvres picturales mais aussi sur des tracts publicitaires.


LA VOIX ET LE MONTAGE…
Si j’ai choisi de réunir en seconde
partie
montage et voix-off c’est que cette dernière dirige les images et qu’ils sont étroitement liés tout le
long du film.
La voix-off a deux caractéristiques principales dans l’île aux Fleurs : elle est omniprésente et elle n’est pas un commentaire dans le sens strict du
genre documentaire.
Omniprésente par le commentaire qui ne s’arrête que de courts instants, souvent les plus éloquents : le génocide juif, la bombe atomique, les pauvres servis après les cochons. Mais aussi parce
qu’il ne nous ai jamais donné d’entendre un des intervenants, qu’ils soient de vrais intervenants ou des acteurs. Ce, qui de nouveau, sépare le film du documentaire puisque nous avons à faire à
un seul et unique commentateur dont le seul point de vue sert de témoignage. La voix est tout juste ponctuée par quelques petits buitages.

La musique vient le plus souvent dramatisé l’image surtout lors du solo de guitare final où les gens, dépourvus d’argent et de propriétaire
ce qui les place après le porc donc de liberté, fouillent dans les ordures.
Et elle n’est pas un commentaire dans le sens où les
images ne sont pas ici prétextes à être décrites comme dans la plupart des documentaires. La voix fait au contraire surgir les images selon les associations d’idées du narrateur.

Pourtant, les explications du narrateur se rapprochent de la première définition du documentaire, héritée de la distinction
faite entre le roman pour la fiction et l’ouvrage scientifique pour le documentaire comme l’explique Guy Gauthier. Presque tous les éléments cités ont
droit à leur rapide définition et ce n’est que par l’association d’idées n’appartenant qu’au narrateur et à ses prises de position que le film se démarque de l’objectivité
scientifique.

Le montage, comme écriture du commentateur suit donc rapidement la parole de ce dernier. Or, le narrateur revient souvent sur ces
associations d’idées afin de mieux faire comprendre au spectateur où il veut en venir. Cela donne lieu à de nombreux flash-back venant rappeler les éléments essentiels de ce qui nous est conté.
Donc, malgré l’apparence de fouillis du film,
Jorge Furtado
suit en fait sa ligne directrice, les flash-back servant à revenir quand il semble trop s’éloigner du sujet. D’où cette impression d’un
montage vivant mais surtout de truc quand on fait comme on veut sur le moment alors, à y regarder de plus prés, tout est pensé et réfléchi à l’avance.
Le montage pose problème comme pour l’utilisation d’acteurs puisqu’il suit une narration et ce n’est pas le récit qui fait le scénario mais bien le contraire rejoignant de nouveau la
fiction.


… ET LA TOMATE
POURRIE

Pourtant, malgré le flot d’idées reçu par le spectateur, l’île aux fleurs revient rapidement sur ses trois thèmes principaux qui sont l’homme, la tomate
et les porcs. Et, surtout, ce qui les lient si intimement dans le film. Et donc, le spectateur s’en vient à se demander dans les premières minutes s’il a bien à faire à un documentaire. Tout
comme nous l’avons vu, le montage, la narration, l’utilisation des personnes ont peu à voir avec le cinéma documentaire. Et c’est à la moitié du métrage environ qu’une des tomates, dont nous
avions suivi les folles aventures économiques, s’en va vers la poubelle puis la déchetterie. Et ce n’est qu’à partir de ce moment que nous est révélé l’île aux
Fleurs
.
L’endroit qui n’a rien de poétique devient dès ce moment un documentaire engagé. Moins d’acteurs, mais plus de pauvres et de prises réelles dont la voix-off ne se prive pas de décrire les us et
coutumes de ces gens qui mangent après les cochons. Finalement ce n’est pas dans la forme que nous pourrions dire que le film est un documentaire mais plutôt dans le fond. L’histoire qui nous
est conté est aussi un constat, l’aspect ludique permettant juste de faire passer la pilule.
Donc l’Ile aux fleurs est composé d’éléments disparates. Peu dans le fond et mais beaucoup dans la forme. Oscillant entre humour et propos engagés, entre
moment ludique et sérieux, les 13 minutes que passe le spectateur sont un petit marathon qui donne l’impression avant l’heure, d’une interactivité inconnue en 1989 ; d’avoir plus à faire à un
document multimédia qu’à un documentaire. Et ce n’est donc peut être pas anodin si l’on trouve tant d’images numériques qui viennent ponctuer le métrage comme des « tableaux » au temps du film
muet. Ordinateur, film muet, collage, photo, trucage, autant de supports mis en œuvre dans l’Ile aux fleurs.

 


L’Île aux fleurs
Titre original : Ilha das Flores
Réalisation : Jorge Furtado
Musique : Geraldo Flach
Brésil, 1989


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