Confinement, un Journal | Jour 25 : Les infiltrés

Les ramifications du trafic de croquettes de l’Amazing Bicoque dépassent de loin mes pires appréhensions. Praline, la jeune chatonne, enfant de la balle, semble être à la tête du réseau couvrant l’impasse et une partie de la piste cyclable derrière les rails du tramway. 

La petite fourbe étant physiquement irrattrapable, je mets en place une équipe d’infiltration. Je copie ici leur rapport (ce dernier ayant été rendu écrit au crayon  sur papier libre)..

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Jeudi 9 avril 2020 : Premier jour d’infiltration
Chez Mullervater & Coco

Il est quinze heures.

“C’est l’heure de se réveiller, Mullervater”, que je me dis. 

Je me suis encore endormi sur le canapé, des miettes de kebab et de drogue récréative parsèment mon t-shirt. Cette fois, c’est sûr, il va falloir le changer. Petit souci, j’avais prévu de faire cela qu’à la fin du mois et je ne suis pas certain qu’il  m’en reste encore des propres de 2019. Bon, au pire, on est en confinement et ça ne dérangera ni Freya ni Coco. Ah oui, Coco… C’est quoi déjà ? Ah oui, on doit partir en mission aujourd’hui.

J’hurle donc à travers l’appartement  : “Coco ! Oh, hé ! Coco merde, debout !” Le problème est que ce cocolocataire est complètement sourd, ayant passé un tiers de sa vie la tête vissée dans des enceintes réglées sur 11, sans oublier que la composition chimique de son sang pourrait intéresser pas mal le monde scientifique. 

N’empêche que je le vois apparaître en caleçon.  
“ – Ouais, quoi ?” Il tente de lisser la tignasse qui lui sert de décoration capillaire. 
 – On doit aller s’infiltrer chez Jal, on a promis hier, ou cette nuit.” 

Il fait sa petite moue qui signifie que “mouf, il a plus trop envie, et je sais que quand j’ai cette tête, je suis trop mignon alors on me passe tout”. Mais moi, je le connais le zèbre, on va pas se défiler, le contrat est juteux… 

Afin de nous motiver, je branche les enceintes et balance un gros dubstep. 

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Le départ a pris un peu plus de temps que prévu. ll nous a d’abord fallu nous nourrir et ça a trainé au kebab ; après, j’ai quand même cherché s’il n’y avait pas un t-shirt propre quelque part tandis que Freya me faisait remarquer qu’elle avait faim ; flûte, plus de croquettes. Du coup, il a fallu se motiver à faire mes courses, mais comme on avait usé toute l’encre de l’imprimante pour nos bons de sortie, on a dû l’écrire à la main. Au magasin, c’était le bordel, genre complètement blindé et, pour couronner le tout, il ne restait plus la marque qu’aimait la chatte ; ça allait sentir le roussi en rentrant. Et ça n’a pas loupé, elle nous a pris la tête direct ; alors on s’est gueulé dessus pendant bien, quoi, trente minutes. C’est Coco, en fin diplomate, qui a réglé la question en roulant de quoi nous apaiser. A partir de là, les choses se sont enchaînées, la Police a sonné par rapport au bruit et on a dû s’expliquer. On n’a évidemment pas réussi, et Coco s’est fait embarquer. Puis, ça a trainé au poste comme toujours. Quand on est finalement revenu à l’appartement, on s’est rendu compte que Freya en avait profité une nouvelle fois pour s’échapper. Alors, on s’est dit qu’elle avait dû repartir chez son parrain Jal, et que ça tombait bien puisque nous y avions affaire aussi. En tout cas, on ne prend pas de risques et on décide d’écrire un nouveau bon de sortie avant de décoller, mais on ne retrouve pas le crayon à papier. D’un coup, je me souviens qu’on l’a prêté au policier pour son procès verbal et qu’il ne nous l’a pas rendu. Coco me rappelle alors que nous vivons dans un état fasciste où les braves citoyens ne peuvent même pas garder leur crayon. Puis, finalement, nous le retrouvons, il avait servi à tasser notre dernière cigarette du sourire. Enfin, avec un peu de retard, nous partons.

***

Jeudi 9 avril 2020 – 8 heures plus tard
L’Amazing Bicoque

On a tout bien expliqué à Jal pourquoi on a traîné, ce dernier a semblé être compréhensif. Je pense qu’il se dit qu’en cette période unique de confinement, il vaut mieux privilégier la bienveillance plutôt que les remontrances inutiles.

Il nous explique alors la mission : nous allons rester en planque afin de filer la dénommée Praline et débusquer le reste de son réseau. Pour ce faire, Jal nous a aménagé une planque derrière les fougères avec un petit plaid pour ne pas prendre froid. 

***

Quelques heures ont passé, tout est calme dans le jardin. La mission s’avère plus compliquée que prévue, nous n’avions pas pris en compte que tenir une planque signifiait ne pas fumer, sinon on se faisait griller comme nos cigarettes. 

Nous tremblons donc moins de froid que du manque. Je sens Coco se serrer contre moi, en recherche d’un shoot de dopamine issu du contact physique. 

Tout à notre souffrance, je m’avise d’un mouvement dans le jardin. Bingo, c’est le chat qui correspond à la description qu’en a donnée Jal : petite, colorée, à la démarche souple et rapide, elle se dirige vers le mur du fond.

Une autre ombre s’approche ; ça y est, on le tient notre réseau, à nous la récompense.

Nous sautons hors de notre cachette pour fondre sur les ombres. D’un bond, la dénommée Praline s’envole au-dessus du mur. Quelle puissance pour ce mini-modèle ! Coco a réussi à attrapper le second individu. Ce n’est pas si mal, si Jal connaît déjà Praline, cette nouvelle prise devrait hautement l’intéresser.

Nous braquons nos lampes sur cette dernière. Un seul mot me sort de la bouche :
“Freya ?!”

A SUIVRE… !

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A suivre – Jour 26 : Les vidéos du dimanche #4

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